Des pratiques œnologiques raisonnées

En 2011 et 2012, la Chambre Régionale d’Agriculture de Bourgogne a réalisé des enquêtes de consommation d’eau et d’énergie, en partenariat avec l’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie) et le BIVB (Bureau Interprofessionnel des Vins de Bourgogne), dans 46 exploitations viticoles, réparties dans les 3 départements. Il y a 8-9 ans donc, le volume moyen d’eau utilisé s’élevait à 6,4 L pour produire 1 L de vin rouge et 2,3 L pour produire 1 L de vin blanc, avec de grands écarts selon les situations.

La quantité moyenne d’énergie utilisée dans un chai vinifiant majoritairement du vin rouge est de 143 kWh/hL et de 45 kWh/hL pour un chai de vin blanc, avec des grandes variations en fonction du volume de vin produit, du type de vin, du nombre des différents types de vins produits, du mode de conditionnement et du bâtiment. La consommation moyenne d’eau par an par personne (ménage) est d’environ 40 m3, c’est-à-dire 40’000 L. Dans la réalité, la consommation varie sensiblement.

Spontanément, on penserait donc que les caves plus grandes utilisent plus d’eau que les petites caves, ce qui est vrai dans la valeur absolue. Quand on regarde cette valeur par rapport au vin produit par contre, généralement, les dépenses d’eau sont mineures, grâce à des cycles continus de pompage de 10 h et plus, sans besoin de pousser à l’eau entre un vin et l’autre, par exemple.

Comment donc un petit viticulteur peut optimiser sa consommation d’eau à la cave ?

La première chose est de connaître sa propre consommation à travers des compteurs d’arrivée d’eau pour monitorer l’utilisation d’eau, jusqu’à identifier les consommations de chaque tâche dans toute période de l’année et surtout pour toutes les opérations d’hygiène. Malheureusement, à cause de la complexité́ des réseaux et de la multitude des postes de distribution et d’utilisation d’eau, ces relevés peuvent être d’une mise en place complexe et nécessitent des prestataires extérieurs pour des sites importants.

En tout cas, la mise en place de compteurs d’eau à relevé manuel sur tous les points d’eau est de faible coût et convient pour tenir trace des consommations. De plus, il est important de surveiller les fuites, d’utiliser des raclettes ou des balais pour évacuer les déchets au sol plutôt que de les pousser à l’eau et de rincer rapidement les équipements et les cuves après chaque utilisation, surtout en cas de vin rouge très tannique.

Quand on veut aller au-delà du simple bon sens, on peut en plus avoir accès à certains outils, comme le canon à mousse, par exemple, permettant d’utiliser moins d’eau et de produits chimiques de nettoyage.

Autrement, on peut  effectuer des nettoyages à moyenne ou haute pression ou avec l’eau chaude et/ou on peut prévoir des temps de contact prolongés pour les nettoyages avec produits chimiques.

Concernant les « eaux de process », l’eau utilisée pour le fonctionnement des pompes à vide peut être recyclée pour des usages viticoles, couplée éventuellement à la récupération des eaux de pluie, ou à l’intérieur de la cave même.

Un exemple pratique est l’utilisation des eaux de rinçage, avec ou sans traitement, pour le premier nettoyage d’un filtre ou d’une cuve. Par contre, il reste clair que les eaux de nettoyage potentiellement en contact avec le vin, doivent être propres afin d’éviter des contaminations éventuelles.

En ce qui concerne la consommation énergétique, plusieurs choses peuvent être mises en place. Pour commencer, il faut effectuer un bilan thermique, puisque de ceci dépend le bon dimensionnement des équipements de production.  Puis, on peut mettre en place des compteurs, pour contrôler en temps réel la consommation énergétique. Grâce à l’étude de la consommation des équipements de cave on peut définir plusieurs scenarii pour réduire la consommation des équipements selon un calendrier.

L’économie réside aussi dans le choix de nos équipements de cave. N’oublions pas que le vin est produit depuis 8000 ans, et qu’à cette époque, le transfert de vin était assuré par la force de gravité et despentes bien calculées.

Mais une œnologie raisonnée est aussi une œnologie qui reconnaît que le vin est vivant et en constante évolution. Nous, les vinificateurs, nous guidons la Nature, nous essayons de lui imposer un chemin voulu par notre conception.

Jusqu’où l’empreinte de l’Homme est quelque chose de positif ?

Est-ce que le vin qu’on a dans le verre aura un goût meilleur si on le filtre jusqu’à la stérilisation ?

Est-ce que le vin qu’on a dans le verre aura meilleur goût si on rajoute des tannins pour simuler la bonne maturation sur plante ? 

Est-ce que le vin qu’on a dans le verre aura meilleur goût si on rajoute a priori des sulfites sur les raisins qui viennent à peine d’être vendangés ?

Est-ce vraiment utile ?

Et enfin, il faudrait se demander s’il ne serait pas mieux d’employer du capital dans des améliorations qui portent, à long terme, non seulement à améliorer la qualité du vin que nous buvons, mais aussi à réduire notre intervention sur ces vins, ce qui signifierait réduire aussi notre empreinte de pollution environnementale. Nous n’avons pas la réponse certaine mais nous raisonnons d’après une considération : sans les produits de la Nature et sans les microscopiques êtres vivants que sont les levures, nous ne pourrions pas avoir du vin, mais sans la maîtrise et le génie de l’Homme, nous ne pourrions pas avoir de vins extraordinaires, puisque la Nature, tend à suivre son cours naturel, et en fin à produire du vinaigre.

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